mardi 14 septembre 2010

... ces étoiles qui tombent du ciel

... ceux qui n'ont pas connu Verdun peuvent maintenant s'imaginer ce que c'est.
J'écoute actuellement Schubert. Et dehors c'est l'hécatombe.  Les explosions nous rappellent à un instinct animal qu'on pensait disparu.
Le 14 juillet.
Son traditionnel feu d'artifice.
Ses "Hooo...", ses "Haaa..." et les vendeurs de chichis qui n'ont d'ailleurs rien à foutre là, si l'on y pense bien...
On se sent un peu comme un cheval. Une lumière très intense gagne tout le ciel.
On voit son voisin pendant au moins quatre seconde.
Pas de pudeur ce soir. On le regarde.
D'ailleurs, il nous a vu. Il comprend.
Pour ce soir...
Explosion
Que fais-tu, toi, ce soir?
Tu as essayé de te trouver une place vers le sempiternel point de ralliement...?
Le pont Neuf.
Sans blague...
Explosion
Avec sa musique de merde et le vendeur de ballons gonflés à l'hélium, d'une superbe couleur argenté.
Pas du tout kitch.

Explosion.
Je me pose des questions.
Tout de même.
Un feu d'artifice, je veux bien... mais là...
J'allume ma vieille radio. Un vieux poste à galène qui lui seul peu retransmettre l'information telquel. Et dans le silence de l'obscurité de la pièce j'écoute les nouvelles...
Tout est noir pour ne pas qu'on me repère. Je ne veux pas que l'on sache que j'écoute la radio pour savoir ce qui se passe dehors.
J'apprends à l'instant que le feu d'artifice s'est arrêté il y a une vingtaine de minutes. Ce que j'entends là est le vrombissement des canons.
C'est bien ce qu'il me semblait.

Explosion

J'apprends qu'au champs de mars tout le monde a été décimé.
On est rentré dans paris.
Qui?... je ne le sais pas. J'essaie de savoir mais les informations m'arrivent par petit bout.
Explosion
Quelqu'un est sur place. Sous des cadavres, apparemment. il parle tout doucement pour ne pas se faire entendre.
Je vois encore le ciel s'illuminer. Et ceux qui assistent au feu d'artifice de chez eux exprime leurs euphorie.
C'est parce qu'ils n'ont pas allumé leur radio, comme moi. Ils ne savent pas ce qui se passe.
Je décide de rester dans le noir de mon appartement... tant que personne ne sais que j'écoute la radio pour savoir, tout va bien...

Explosion.

Je suis le seul, semble-t-il.
J'entends de part et d'autre quelques exclamations.
Des  enfants s'amuse de tout ce bruit.
Certains ont peur.
j'entends une voie que je n'avais jamais entendu leur dire, à ces enfants, de ne pas s'inquiéter. Que ce qui se passe maintenant est pour le bien de l'humanité...
Les enfant ne comprennent pas mais je vois que les adultes ont disparu des fenêtres, les laissant seuls.
Dans l'immeuble d'en face, plus aucun adulte. Et des enfants ivres de cette toute nouvelle solitude.
Qu'est-ce que ça veut dire?
D'un coup le ciel s'enflamme comme jamais.

Explosion.

Une détonation si forte et si puissante qu'elle me fait sursauter.
On frappe aux portes.
On demande s'il y a quelqu'un. On veut savoir si une personne se trouve ici, qui aurait dû être au champs de mars pour les festivités.
La même voie singulière de tout à l'heure que je n'ai jamais entendu.
Explosion...

On frappe à ma porte...
Le journaliste sur place, là-bas, ne parles plus depuis une dizaine de minutes.
Je ne sais pas qui a marché sur paris, mais ils marchent actuellement dans la cours de mon immeuble et montent les marches de mon escalier...
On frappe de nouveau. On cris au travers la porte. La mienne.
Je pense qu'ils ont entendu mon vieux poste à galène.
Ils savent que je sais...
Je pense qu'ils ne vont pas tarder à enfoncer la porte...
Je devrais sans tarder fou...




journal de Mr ... , laissé un 14 juillet 20...

lundi 26 avril 2010

Cultiver l'Amour

...Pour certains, l'Amour et le Savoir ont en commun qu'il peuvent nous élever ou nous flatter.

NickTronik (lien)

mercredi 21 avril 2010

Le matin

... le matin, quand on ne veut pas se lever.
S'il est trop tôt pour boire un verre, au moins il n'est pas trop tôt pour y penser ...

Dr Cox.

lundi 12 avril 2010

Trois ans, six mois, six jours... et une belle matinée.



Le soleil a depuis quelques heures cette délicate chaleur d'un très beau samedi matin.
De ces matinées d'avril qui donnent envie de prolonger un peu certains instants qui d'habitude filent entre nos doigts, à regret.

Gérard est déjà levé.
Dans son sommeil déjà, un peu avant de se réveiller, il a eu envie de faire le petit déjeuner pour deux. Cela fait bien longtemps... Il s'est donc levé. Sans bruit, pour ne réveiller personne. Le lit est encore chaud. Un lit d'amour. Plein d'un amour qui dort.

Il est devant l'évier, le regard dans le vide. Aujourd'hui il semble que rien ne puisse lui ôter son envie de vivre et de dire au monde qui ne la connaitrait pas encore « je vous présente Lucie, ma femme ». A son ton, on comprendrait aujourd'hui que cette phrase sonne comme une loi vindicative. Presque menaçante pour ceux qui doutent d'aimer quelqu'un.

Les toasts sont dans le grille-pain. Il sait encore, malgré le temps qui a passé, à quel moment exactement les retirer pour qu'ils soient parfaitement dorés. Comme elle les aime. Ni l'un ni l'autre n'ont jamais pensé après dix ans de vie commune à régler le thermostat du grille-pain pour avoir la cuisson idéale. Gérard s'est toujours si bien débrouillé qu'aucun d'eux n'en a éprouvé l'utilité.

Cela fait quelques années qu'ils ne vont plus au marché situé à une centaine de mètres, le week-end pour prendre du lait de ferme. Elle l'aime pourtant beaucoup (il a toujours supposé que la raison se trouve être dans son enfance. Son père était fermier).

Il sort de sa torpeur.
Gérard pense à on ne sait quoi. Plus il lui prend l'envie d'être heureux, par moment, plus il est absent. Comme ces gens qui fuient une réalité qui a tourné au vinaigre.

Il sort le lait d'une marque inconnue de son réfrigérateur. Un lait demi-écrémé parfaitement quelconque. Et cela aussi, d'ailleurs, lui donne envie de s'évader. Il a posé la casserole sur le feu. Il ajoutera à la fin de la cuisson un peu de cannelle dans le chocolat. Il aime ça depuis qu'elle lui a fait goûter.

Cela fait plusieurs année qu'il n'a pas fait le petit-déjeuner en attendant que Lucie se réveille. La vie nous fait perdre parfois les plus belle habitudes du monde. C'est à cela qu'il pense parfois, longtemps.

Il écoute le silence de son appartement et croit distinguer derrière chaque bruit de la rue le souffle paisible d'une respiration. Lorsqu'il passe devant la fenêtre, la rue semble partager le bonheur qui lui est passé derrière les yeux toute le matin. Comme une sorte de brouillard diffus. Un bonheur inextricablement mêlé de regret.

De rancœur, aussi.

Il entre dans le salon pour déposer le plateau devant le fauteuil de Lucie.
Comme pour conjurer le sort, il veut en faire un tout petit peu plus. Il décide d'aller dans la salle de bain et de grimper sur une chaise. La seule façon d'accéder par la fenêtre au balcon du voisin qui, lui, a toujours de magnifiques fleurs, presque à toute période de l'année. Il coupe la plus belle qui est à sa portée non sans prendre quelques risques un peu insensés. Et puis ses os ont une bonne quarantaine d'années maintenant, il n'a plus la souplesse qu'elle lui a connu lorsqu'ils étaient plus jeunes.
Il espère comme il l'a déjà espéré ne pas s'être fait voir par son voisin, un petit jeune d'à peine trente ans. De quoi aurait-il l'air?

Un peu essoufflé il dépose la fleur dont il ignore le nom sur le plateau. Voilà. Il fallait au moins cela pour aller au bout de son envie. Les tartines sont chaudes, le beurre fond dessus. Le chocolat est dans le bol. Un soupçon de cannelle flottant à la surface.

Il n'a plus de confiture. Elle aimait ça, pourtant.

Il s'assoit à côté, encore un peu essoufflé. Son regard voyage sur le plateau. Sur le pain,... dans les volutes de fumée que produit le chocolat chaud fait d'un lait médiocre. Une cannelle probablement éventée et une fleur qu'il entend se faner à chaque seconde.
Et son regard va plus loin. On ne sait où...

Il se met délicatement à pleurer.

Le lit est froid. Les bruits de la rue ne cachent rien d'autre que d'autres bruits de la rue. Et dans l'appartement baigné par ce délicat soleil d'avril, on entend un homme qui pleure devant le petit déjeuner parfait qui refroidi.

Il tient l'alliance qui est à son doigt de l'autre main, pour assurer au monde que non, il ne la lâchera pas comme ça. Que non, parfois ce n'est pas juste.

Et lorsque quelques uns de ses amis sincères lui suggèrent avec pudeur d'ôter un jour cette bague, il devient amer.
Et d'une colère contenue il leur dit que non. Pas encore.

vendredi 19 mars 2010

Les entans prêcheurs

C'est l'histoire d'un prêcheur. Un prêcheur de la bonne parole, la parole de l'amour...
Pour son plus grand désespoir, il se rendis compte qu'il n'y avait plus rien à prêcher depuis longtemps... puisqu'il n'y avait plus d'amour depuis longtemps.

c'est l'histoire qui va suivre, et sa suite... et peut-être sa fin si l'amour ne revient pas.


Au début, il fut perdu par la tâche qui lui incombait.

Il y a longtemps déjà que son périple a commencé, mais en ces temps et en ces lieux, le temps lui même n'a plus d'importance – en supposant qu'il en ait eu un jour.

Il avait donc vu plusieurs contrées nouvelles ou anciennes, plusieurs peuples très différents ou plusieurs sortes d'habitants qui vivaient tous, pourtant, dans le même monde. Tous si différents. Si différents... comme les lieux qu'ils occupaient.

Il était dans ce monde, où le prêcheur devait accomplir sa tâche, une diversité et une singularité qu'il n'était pas ailleurs. Et le prêcheur n'en fut que plus désemparé.

Dans les premiers temps de son arrivée il fut conquis par le calme de ces lieux. En tout endroit, en toute chose il semblait qu'une sagesse sombre avait aboutie après une longue, très longue réflexion. Il y avait là-bas une sérénité quelque peu malsaine qui 'était était reposant. Comme si elle servait à cacher quelque chose... une tristesse si grande qu'elle ne peut plus être exprimée par les hommes, peut-être.

En un temps de grande marche vers il ne voyait où, il fut surpris de croiser l'Envie, la Tentation, qui avait pris soin, sans s'en cacher, de prendre forme humaine pour la circonstance. Une adorable petite fille dont le regard traillissait l'expérience.

"- Bonjour petite fille. Que fais-tu là, toute seule?

- Je n'ai personne pour jouer avec moi."

Des larmes s'échappaient de sa voie.

"- Pourquoi, qui es-tu?

- Quelqu'un de très seul. Ici, je ne peux pas agir, car, après tout, je n'existe que parce qu'on m'a inventé.

- Et on pas besoin de toi, ici?

- Non. Pourtant... le monde n'en serait que plus distrayant. Trouvez-vous réponse dans votre quête?

- Non, mais je n'ai croisé que peu de monde. Il me reste encore de l'espoir...

Son visage s'assombrissait :

- ... l'espoir est tous ce qui reste aux jeunes sots qui n'ont plus rien."


"- Sachez, monsieur, que d'ici la fin de cette route, il ne vous restera que le plaisir – que dis-je, l'espoir de me retrouver, lorsque vous n'aurez définitivement plus rien, pour que je vous donne quelque chose à mettre dans votre tête...

- N'en fais pas une parole petite fille, les sots ne se rendent jamais compte du malheur qui les gagne...

- Vous en êtes la preuve mon pauvre ami... vous vous apprêtez à devenir orphelin de tout songe susceptible, ici, de vous faire progresser.

- Il y a toujours à faire. Partout... Moi, j'apporte le bonheur et je l'invente grâce à rien. Grâce à moi-même..."

Le jeune fille s'évapora dans le noire profond qu'était devenu ses yeux.

" Petite fille?!..." Et au loin:

" ... Vous vous perdrez tellement vous-même que vous accourrez à moi pour que je vous dise qui vous êtes...

- Pourquoi vous?!...

- Parce que je suis la seule personne qui sache encore ce qu'elle est ici-bas..."


Pauvre... l'homme se tût là. Il n'avait plus de mot. Pauvre était le dernier qui lui restait, là, maintenant. Pauvre... ce monde est tant chaviré qu'il semble que l'Envie en soit la reine. Faut-il que plus personne ne représente rien pour que le visage d'une enfant soit la personnification de pareilles calomnies? Moi qui espérais trouver un visage semblable pour représenter ma première victoire... (il regarde au loin) Même les arbres n'ont plus de feuilles...


Il continua son chemin et ne tarda pas à gêner le regard d'un jeune penseur, assis sur le bord du chemin.

"- À quoi penses-tu, jeune garçon?

- Je penses que ce monde est bien triste...

- Pourquoi?

- J'ai vu un arbre qui semblait avoir perdu une branche. J'ai proposé de la lui remettre mais il m'a dis que c'était fait et que s'était trop tard, qu'il ne fallait pas aller contre les éléments pour ne pas créer d'erreurs. C'est bien triste...

- Tu veux que je te parle de l'Amour et de la joie de vivre? C'est ma quête...

- Non.

- Non?... Pourquoi?

- parce que ta quête ne correspond pas à une loi universelle. Elle n'a pas une place définie dans la chaîne des lois primordiales, ou encore dans le grand livre des cent-milles lois, quelque part. Elle sera donc source de malheur...

- Mais c'est important quand-même!...

- Pas autant que de ne pas remettre une branche cassée à l'arbre qui ne la désire plus.

- Mais tu réparerais l'arbre...

- ... Mais à quel prix?..."

L'enfant se leva et se mit à courir dans le champs qui bordait un côté du chemin, faussement joyeux.

Un nuage passa par là, l'enfant monta dessus et disparu avec lui dans les airs.

L'homme commençait à penser qu'il ne connaissait rien à la vie, puis il se dit que si, mais que ce monde était très différent... puis, il se dit que, peut-être, l'amour ne sert à rien ici. Que c'est peine perdue tant que l'on ne comprend pas le monde qui nous entoure. Il se dit également que, de toute façon, l'amour n'aurait pas sa place et ne servirait pas. Il se dit qu'il était ici dans le seul monde de sa connaissance où l'amour n'est rien, et ne servirait à rien, quand bien même il y en aurai à perte de vue. Il se dit qu'il vaudrait mieux une éponge pour ôter les mauvais souvenirs de ces enfants dont l'expérience leur a trop appris, et trop vite, il semble. Une éponge capable d'absorber toute cette expérience, aussi profitable qu'elle pourrait être pour l'avenir. Puis il pensa que de toute façon, il semble qu'ici il n'y avait pas d'avenir.


Un long, un très long présent.


L'homme, devenu la ressource d'un grand doute, continua son chemin. Il commençait à baisser la tête.


Plus loin, alors que derrière lui il n'y avait plus trace de son passage et de ses interlocuteurs, il vit un morceau de papier qui menaçait d'être emporter par un léger vent. Il disait ceci:

"Regarde..."

Il leva les yeux et vit une pancarte sur le bord du chemin. Il y était écrit "Presque-fin".

Il relit ces mots dans sa tête. Il se les dit. "Presque-fin". Il pensa tout haut:

" C'est la "presque-fin", mais pas la fin..."

Une voie s'éleva derrière lui.

"Pourquoi t'obstiner, monsieur?"

Le prêcheur se retourna et vit un petit garçon qui lui était inconnu:

"- Qui es-tu?...

- Un petit garçon, et je te demande pourquoi tu t'obstines, monsieur? Ici, ça ne sert à rien...

- Ça ne sert à rien parce que personne n'a essayé...

- Tu prêche quoi?...

- L'amour. Mais comment sais-tu...?

- Moi, quand j'avais ton age, j'ai prêché la joie... tu as vu un enfant tout à l'heur. Il prêchait le pouvoir de penser, avant... Nous avons tous été comme toi, à croire que l'on pouvait répandre une parole qui, ici, hélas, n'a pas de sens. Ne te tue pas à cette tâche, c'est un conseil. Elle sera vaine... de toute façon.

- Tu veux dire que avant, tu étais un adulte, comme moi?...

- Oui, un adulte, c'est exactement ça, oui. Un adulte.

- Comment...?

- ...J'étais un adulte en dehors, mais un enfant à l'intérieur, comme toi, parce que, dans le fond, comme toi aujourd'hui, nous ignorions tout du monde d'ici. Alors comme toi dans quelques pas, nous avons demandé à l'Envie – la seule personne à être sensée ici – ce qui se passait. Nous lui avons tous demandé, un jour ou l'autre, de nous expliquer...

- et?...

- ... et, à moi, elle m'a dit que je ne comprenais pas parce que je m'étais tué à une tâche sans en comprendre le sens. La cause et la conséquence. Elle nous a tous dit de nous ouvrire à ce monde et que, ainsi, nous pourrions voir qu'il n'a pas besoin de nous ou que, au mieux, nous pourrions le changer de l'intérieur.

Je lui ai demandé de m'apprendre ce monde, de me l'expliquer... elle m'a dit que c'était là le travail de tout une vie, et que maintenant j'étais trop vieux.

- C'est pour ça...

- Je lui ai donc demandé de me faire devenir enfant, comme eux, comme les autres, afin de recommencer mon apprentissage ici, pour, cette fois, devenir un adulte dans la tête...

- Devenir adulte voudrait-il dire ne plus avoir d'espoir?

- C'est un bon début. Bien maigre, mais un début. Ici, l'espoir ne sert à rien. Ce monde est comme ça parce que tu le vois ainsi. Tu dois le voir à l'intérieur de toi, c'est toutes les âmes qui sont ici qui fonds se monde parce qu'elles le voient par leurs yeux. Toi, tu vois ce monde par les yeux du monde d'où tu viens. Ce monde n'est pas pareil. Il ne l'est pas...

- Mais c'est vous qui faites ce monde, pourquoi ne pas le changer, maintenant?

- Tu sais, on a appris à le connaître. Il est pure et nous, nous sommes des enfants... Nous avons commencé notre apprentissage de ce monde, et aller contre la continuité le renverserait. Nous l'avons compris, maintenant...

- Ça n'est pas ce vous vouliez?... le renverser...

- Voudrais-tu changer ton monde pour celui-ci? Nous, maintenant, sommes des enfants d'ici... et à le comprendre, nous ne voulons plus le changer. Un petit conseil: quand tu iras voir la Tentation, elle te dira de comprendre ce monde et que, ainsi, tu pourrais, et uniquement après cela, le changer... Sache que si tu le comprends, tu ne pourras plus le changer. Si tu veux vraiment le changer, reste grand, avec tes idées, mais sache aussi que, ici, tes idées sont ridicules et ne représentent rien...

- De toute façon, c'est peine perdu... Que faire?

- C'est peine perdu car tu n'as rien à faire ici...

- Aide-moi...

- Tu veux que je t'aide? ... Souviens-toi, je vais t'éclairer, souviens-toi, au début de ton chemin, l'Envie t'as dit que tu n'aurais plus d'espoir à la fin de cette route...

- J'en ai bien encore un peu, mais...

- ... Tu dois te tromper... nous y sommes."

En effet, sur le bord de la route, il y avait une pancarte sur laquelle il était écrit ceci: "Fin".

Sur ce, l'homme, content qu'il lui reste un peu d'espoir appela l'Envie:

"- a-t-il?

- Tu vois, il me reste un peu d'espoir, et nous sommes à la fin...

- Le peu d'espoir qu'il te reste ne m'inquiète pas... et puis, ton espoir a laissé place à la compréhension. Tu as compris beaucoup sur ce monde... tu ne pourras pas le changer...

- Je le ferais! Il m'en reste, et je m'en servirais pour changer ce monde!

- Ce monde, qu'a-t-il de pire que le tiens?

-... rien...

-... et malgré tout vous êtes comme ça. Vouloir changer les choses en croyant bien faire, sans vous soucier de ce qui vous entour... essayez, et réussissez, je vous le souhaite...

- Pourquoi?... Pourquoi?...

- Vous n'avez de cesse de venir en ces lieux en croyant bien faire et en voulant changer ce monde qui s'est créé grâce aux habitants d'ici... Détruisez, puisque vous le souhaitez tant... vous avez peut-être raison... le hasard d'un monde neuf vaut peut-être la tristesse et la pureté d'un monde qui a vécu au travers l'âme de ses habitants...

- Comment changer ce monde pour qu'il soit bon et beau...?

- Il faut lui parler dans votre tête... pour le changer vous même...

- Pour cela, je suppose qu'il me faudra accomplir le travail de tout une vie, que je suis trop vieux? je suppose qu'il me faut redevenir petit?

- Oui...

- Jamais.

- Et bien votre tâche ici est devenue, à l'instant, éternelle...

- Je ne pourrais plus le changer une fois petit...

- S'il vous reste un peu d'espoir...

- ... oui, je suppose..."

L'homme s'avança, dépassa la pancarte pour prendre la main de la petite fille. Il s'agenouilla, pour qu'elle lui touche le front. Dès lors, juste avant de devenir un petit garçon, il savait qu'il deviendrait comme les autres, et il n'avait plus d'espoir. Il s'était voilé la face avant d'avancer près d'elle, pour se permettre cet échec sous de faux airs de victoire prochaine. Il n'avait réellement plus d'espoir avant d'être changé en enfant, voyant qu'il était bloqué ici, dans ce monde, contre tous.

C'est la voie d'un petit garçon qui s'éleva:

"- Tu as gagné. Tu es contente... j'ai dépassé cette pancarte quand je n'avais plus d'espoir... je vais devenir comme les autres...

- Tu l'es déjà. Je suis un peu déçu... j'avais envoyé quelqu'un te prévenir afin que tu ne face pas la même erreur que les autres... je voudrais tant que se monde change. Que les gens veuillent plein de choses. Souhaitent, espèrent à perdre la raison... Mais tous, ici, comprennent ce monde.

- C'est toi qui avais envoyé le petit garçon?...

- Oui. Je te l'ai dis au début, je m'ennuie...

- Tu ne peux pas le changer, toi?...

- Je n'existe que par eux...

- Je n'ai envie que d'une seule chose maintenant: comprendre ce monde, puisque je n'ai rien d'autre à faire...

- Tu vois, la seule chose qui reste, c'est l'envie... c'est pour ça qui j'existe. Mais voilà que je suis réduis à accomplir ce qui existe déjà. Mon devoir est un néant sans fond. Un ennuis perpétuel... Même en te prévenant, tu n'as pas pu évité ce qui semble être une inéluctabilité... à hauteur d'homme, seulement. Il faut croire que tu es particulièrement faible, ou lâche... ou peureux. Mais tu as des idées,... je vais pourvoir m'amuser avec toi si tu m'oublis... Promets-moi de m'oublier...

- Promis.

- Comment t'appelles-tu?

- J'm'appelle Pierre et je veux changer ce monde, maintenant que je peux...

- Oui, tu peux... c'est bien... ça va être marrant... Oublis-moi, Pierre!"

La douce enfant s'envola, un sourire aux lèvres, dans le noir que dégageait ses yeux.

"Au revoir."Dit Pierre.

Pierre marcha sur la suite du chemin qui le conduisit à l'entrée de ce monde – une forêt sans feuilles.

Dans le bois, il entendis un bruit...

"-Bonjour!... Pierre regarda partout.

- C'est moi, la branche, qui parle...

- Bonjour... comment tu t'appelles?

- Je m'appelle Tom, et toi?

- Je m'appelle Pierre..."

Voilà pourquoi les enfants n'aiment pas grandir

Entre incompréhension et désillusion, voilà où se situent les impressions d'Elisabeth.
Elle s'est arrêtée d'évoluer l'espace d'un instant car elle essaie de comprendre.

Un brouillard d'idées parfaitement révolutionnaire est sur le point de jaillir de son cerveau sans pour autant qu'elle puisse les utiliser encore.

Elle sent un monde de ressentiments voir le jour. Un monde dont elle ignorait tout jusqu'à maintenant. Et si elle n'a pas encore la faculté de savoir que toutes ces nouvelles idées avec lesquelles on change un monde la suivront toute sa vie, elle peut dès à présent percevoir un goût étrange. Elle commence à percevoir inconsciemment qu'il se passe quelque chose dans sa tête. Une saveur semble gagner toutes les idées qu'elle a logé en elle depuis la nuit des temps, depuis son propre commencement.

L'encre a une odeur bizarre. L'encre qui écrit sur la feuille ce que personne ne pourra plus jamais effacer a cette odeur caractéristique que l'on n'oublie jamais après l'avoir senti une fois.

C'est l'odeur qu'il y a dans la tête
d'Elisabeth alors qu'elle regarde la voiture s'en aller. Et on sait tous que se goût a des pouvoirs étrange tout le reste de notre vie.

Elle suggère à son corps de répondre, tente de protester contre ces choses qui ne devraient exister, contre cette voiture qui s'en va, contre les gens et contre sa mère.
Mais son corps refuse. Comme s'il s'en moquait. Comme s'il était déjà adulte, lui.
Il lui vint une sorte d'impression curieuse.

La révolte.

La révolte de sa tête contre son propre corps - ce goût, également, on ne l'oublie jamais.
...Et contre sa mère, aussi.

Comment les enfants ont décidé d'en finir



Il y a des enfants qui pensent, eux, que le monde, passé un certain âge, devient moche et terrible.

Terrible surtout.

Si bien qu'ils ont peur de grandir.


J'en connais. J'en connais au moins un.

Son regard m'offrait de partager ses craintes lorsqu'il regardait le spectacle du monde.

Peu a importé de savoir combien d'enfants seraient présents pour le doux Concerto de la Folie en incompréhensible Majeur. Peu a importé au monde de savoir combien ne comprendrait pas. Peu a importé de savoir combien, malheureux qu'ils ont été, combien d'enfants on, eux, parfaitement compris ce qu'il se passait.
Les adultes engendrent un monde qui gagne du terrain.

Peu a importé aux gens, qu'on ne peut appeler ainsi que parce qu'ils ne sont plus des enfants, peu leur a importé de voir leurs propres enfants préférer la mort que l'oubli.

Comme ces petites pensées solitaires qui sont dans nos têtes, qui fuient notre intellect, et qui donnent un goût amer à tous le reste de notre existence. Comme ces petites pensées qui fuient pour ne pas être oubliées et dont le goût n'est autre que la réminiscence de ces mêmes petites idées qui rejaillissent de temps à autre dans notre mémoire consciente.

De temps à autre on se souvient.

De temps à autre on se rappelle nos belles pensées.

De temps à autre on se met à pleurer. Pleurer parce qu'on est plus l'enfant qu'on était, et que, encore aujourd'hui, des fois on préférerait la mort que d'avoir eu à grandir.

Ce qui c'est passé n'est pas un hasard, semble-t-il. Ce qui s'est passé devait se passer, peut-être, parce que nous pouvons tous, à notre façon, justifier ce qu'ils ont fait, et parce que nous aurions tous être à leur place un moment ou un autre.

Plus de sept cent mille enfants aux quatre coin du monde, une même longue nuit ont refusés d'oublier.

Personne ne demande pourquoi. Tout le monde s'est vu un instant à leur place.

Ils n'ont sans doute pas trouvé le chemin


Il n'y a pas d'ami.
Il n'y en a jamais eu.

Ce qu'il y a à la place de cette chose qui est sensée être là, c'est le vide. Un vide impalpable.
On nous fait croire que l'on a des amis ou que l'on peut en avoir au cours de notre existence, on nous saoule, on nous alcoolise avec nos futurs amis qui nous aideront à combattre toutes les difficultés de la vie – ces mêmes difficultés dont on nous assène sans la moindre pitié. À quoi bon avoir de la pitié? Si ça n'est encore le cas, si nous n'avons pas encore ces précieuses compagnies et bien, ils nous le promettent, bientôt nous aurons des amis. Des vrais. Des amis à ne plus savoir qu'en faire, et qui nous aideront, chacun d'eux, à relever la tête et à mener le combat dont, ils nous le promettent encore, nous sortirons victorieux. Ces amis dont ils nous parlent tant et tant qu'ils se permettent envers nous toutes les cruautés, comme s'ils étaient déjà là, ces amis qui sont l'excuse de toutes les souffrances subit par nous, victimes des dieux élégiaques, ces amis ne sont jamais venus.

J'ai pourtant attendu longtemps. Aussi longtemps que j'ai pu.

Un moment, même, j'ai tendu le bras dans l'aire, pensant pouvoir attraper un ami en route vers un autre endroit qu'ici... J'ai même tendu le bras. Comme un salut. Et j'ai attendu quelques temps, le bras tendu devant moi, ou à coté. J'ai attendu. Et sur l'autre côté. Et j'ai attendu encore.

Et puis j'ai réalisé en tendant ce bras qu'il n'y avait personne autour de moi. Personne, et pas d'ami.

J'ai réalisé qu'il n'en viendra pas. J'ai réalisé qu'il n'est pas inéluctable de finir à deux, ou très bien entouré, comme ces gens dont on nous parle depuis notre enfance.

Il est possible, oui, que nous soyons véritablement seuls. Chacun, attendant ses amis, et chacun désemparé par le mensonge qui vient de nous sauter aux yeux.

Nous avons tous entendu cette petite phrase un jour, se loger au coin de notre tête. Cette phrase qui ne voulait rien dire. Cette petite phrase qu'il nous étonne de ressortir aujourd'hui et qui pourtant résume tout. Tout: " nous sommes tous seuls au monde."

C'est à peine croyable.

vendredi 5 février 2010

Voilà pourquoi les enfants sont à jamais seuls

Après la mort des enfants, le monde saigna pendant une année entière.
Il ne s'agissait pas là du deuil de chacune des familles, non.
Chacune des familles, chacune de leur côté, mettra plusieurs années à s'en remettre.

Non.
Il s'agissait bien là de l'enfance du Monde qui s'était donnée la mort. Pas simplement des enfants, des milliers d'enfants. Non, pas simplement.
L'enfance du monde.
Pendant plus d'un an, il sembla que l'on pu ressentir partout autour du globe que le Monde n'avait plus de descendance.
Chaque parent se sentait seul. Chaque ville, chaque village ne possédait plus ses formidable “génération futures”. Tous, absolument tous, tout le monde, le monde entier, en passant par les vieillards et les adolescent, tous avait perdu leurs chers enfants, leurs bambins...

Ceux qui vivait toujours se faisaient coudre à même la peau, en fil de coton blanc, le deuil qu'on leur ferait porter toute leur vie.

Cela se fit en un instant.

En un instant, tous les survivants se firent coudre sur la peau le deuil et la culpabilité. Ce fil de coton blanc formait des lettres incompréhensibles - comment écrire ce qu'on ne peut comprendre?
Les enfants furent marqués de cette blessure.
Ceux qui avaient survécu.

Au tout début, ils souffraient de ne pas savoir les lire ; comprenaient, ou on leur faisait comprendre qu'ils étaient trop jeune pour comprendre mais qu'ils comprendraient en lisant.
Puis ils ont appris à lire et ne comprenaient toujours pas. On leur dit qu'il leur manquait le vocabulaire...
Le Vocabulaire.

Puis ils devinrent adultes.
Ils devinrent adultes et comprirent qu'ils ne comprenaient pas, tout simplement parce que les lettres qui leur déchiraient encore la peau ne formaient pas de mots, ne formaient pas de lettres.
Peut être parce qu'il n'y avait rien à dire, et que les adultes ne voulaient tout simplement pas oublié, alors ils ont décidé d'écrire ce qui s'étaient passé, sans trouvé les mots pour le raconté, sur leurs propres enfants.
Les enfants qui étaient devenu adultes se rendirent compte que l'on avait écrit sur eux le poids d'une blessure que personne ne voulaient oublier. Leurs parents avaient écrit sur les survivants et avaient cousu sur eux en lettre illisible de ce coton blanc mystérieux le Malheur pour ne pas oublier que leurs enfants étaient morts. Et ces grands enfants, à chacun des mouvement qu'ils devraient faire tout au long de leur vie, souffriraient de cette blessure qui ne se refermera jamais. Parce que leur aïeux ne veulent pas oublier que leurs enfants sont morts.

Les survivants ne comprirent jamais, faute de ne pouvoir le lire, ce qui c'était passé.

Et à chaque pas qu'ils faisaient dans la vie, on les regardait comme des survivants...

jeudi 4 février 2010

Voilà pourquoi les enfants son silencieux.

Toutes les choses qui flottent dans l'air sont perçues par les les enfants.
Mais Magalie, elle, ne le dirait pas de cette façon.
Magalie pense, elle, qu'il y a plein de choses qui lui échappent.
Elle a hâte de grandir, d'ailleurs. Puisqu'en grandissant, on comprend mieux les choses.

C'est papa et maman qui disent ça, souvent.
Et même si de temps en temps, comme on sent une légère piqûre, elle pense qu'ils se trompent secrètement, elle a fini par admettre cette axiome. Mais n'y croit pas vraiment. Disons plutôt qu'elle l'a admis comme on admet quelque chose qui n'a pour nous ni sens , ni aucune espère d'importance...
L'impression que lui fait d'ailleurs cette espèce de vérité extra-terrestre est la même, à chaque fois qu'il lui prend de se la dire en elle-même. « Papa et maman comprennent mieux les choses... parce qu'ils sont grands ».

Aucun sens.
Comme si ces mots étaient associés librement dans une phrase incorrecte syntaxiquement. Des mots que, pense de temps en temps avec effroi Magalie, seul un automate dépourvu de vie pourrait prononcer...
Elle ne sait pas pourquoi elle repense à cette histoire d'automate.
Une petite fille au milieu d'une conversation, un jour, avait glissé l'éventualité que certains adultes pourraient être des machines, tellement il semble que ce qu'ils disent est bizarre des fois, avait-elle dit.
Magalie y pense de temps à autre avec une sensation curieuse, mêlant l'improbable et le parfaitement cohérent.

Magalie aime sa maman.
Et il n'est pas question de savoir si réellement maman a tort ou raison. Ce qui est sûr c'est que sa maman n'est pas une machine.
Elle se sent coupable de blasphème, un peu, à chaque fois qu'elle pense distinctement à sa maman et à ce que lui avait dit cette petite Margaux, sur les automates.
Papa... papa, peut-être, oui.
Mais peut-être est-ce normal. Après tout, les adultes sont très loin des choses que l'on sait. Il semble assez logique que leur vie, leurs habitudes tout le reste le soit aussi.
Non. Un automate, maman, jamais...

Magalie n'est pas stupide. Elle sait que deux robots qui s'aiment ne font pas un bébé humain. Ses compétences en biologie ne s'étendent pas plus loin. Pas au point de savoir si d'un amour entre un robot et une humaine peut naître un bébé humain.
A moins que...
Et puis Magalie se souvient que ça fait déjà longtemps qu'elle n'a pas pleurer.
Et puis elle cherche dans sa mémoire...
Non. Elle ne se souvient pas avoir déjà pleurer.
Elle cherche.
Oui... les enfants pleurent.
Les enfants... humains.

Elle reste là, un instant. Comme en suspension au milieu de ces idées très graves qui lui sont passées dans la tête. Le souffle coupé. Dans un état... pas un état de choc, mais plutôt avec le désir de se laisser un temps de répit avant d'y penser...
Même en pensant à ses parents, elle n'arrive pas à se rassurer. Comment sa mère aurait-elle pu tomber amoureux d'un robot par inadvertance?
Impossible... Enfin, il semble peu probable que la maman de Magalie se soit fourvoyé à ce point.
...
Peut-être que sa mère le savait.
Peut-être que sa mère est tombée amoureuse d'un robot de façon parfaitement consciente.
Peut-être même que ses parents voulaient un bébé un peu mécanique...
Magalie a l'impression d'entendre cette petit camarade à côté d'elle, profiter de toutes ces questions pour s'immiscer dans sa conversation intérieure.
Elle sait bien, Magali, que ces choses là n'existent pas. Ce ne sont peut-être même pas ses propres idées qui la travaillent, mais bien les idées de cette fille bizarre.

Elle se demande si les gens peuvent, par des moyens étranges, s'introduire dans la tête des autres pour y résider insidieusement et de façon permanente... Elle se demande si par hasard toute cette conversation qu'elle poursuit avec elle-même est réellement issue de sa propre volonté ou bien si c'est la volonté de cette petite fille, Margaux, avec son seau et sa petite pelle faisant semblant de jouer dans le bac à sable...

Et que penserait son père de toutes les idées qui lui passent par la tête? Son père...
Aurait-il voulu avoir un bébé mécanique, lui?
Magalie se demande s'il aimait tellement sa maman qu'il a renoncé à son rêve de bébé mécanique pour avoir une fille à moitié humaine seulement.
Elle est un peu rassurée.
Ça confirme un peu ce que son papa lui a dit quelques jours plus tôt. Qu'il aime sa maman plus que tout.
C'est pour cela qu'ils partent.
Tu es le fruit de cet amour, lui a-t-il dit ensuite, alors oui, bien sûr que je t'aime. Et je t'aimerais toujours, quoi qu'il arrive... tu es mon poussin.

Elle regarde par la fenêtre arrière de la voiture et se demande si on peut aimer toujours.

Non.
Magalie a pris son parti de penser que non, toujours n'existe pas. Si non maman serait assise sur le siège avant de la voiture. En fait, ils ne seraient même pas dans la voiture à cet instant puisqu'ils ne seraient pas en ce moment même entrain de quitter sa maison. Celle qu'elle aime parce qu'elle lui fait penser à maman...

Elle choisi de ne pas répondre à la question du toujours immédiatement. Connaître la nature exacte de son père est une question assez délicat pour choisir de prendre son temps pour répondre.
Magalie arrête là sa pensée. Encore.
En même temps que toutes ces impressions qui flottent à présent dans sa tête et sur lesquelles elle reviendra il passe un elle un constat plus terre-à-terre que tout les autres.

C'est éprouvant de chercher dans l'inconnu des réponses. Et puis ces questions... suis-je sûr d'en saisir l'importance? (Elle ne se pose pas cette question en ces termes exactes mais elle éprouve un gros doute indistinct concernant les problèmes qu'elle soulève).
Elle se retourne brutalement.
Les idées sont balayées d'un courant d'air de réalité. Le bruit du gravier.
Son père est sorti de la maison et s'approche de la voiture.

Elle prend soin de cacher derrière un lourd rideau tout ses doutes. Hors de question que son père les voit.
Son père monte dans la voiture, Magalie prend une mine de circonstance pour jouer la comédie, mieux que jamais.
Qui donc est-il?

Il ne comprendrait pas. Ou si, mais il serait vexé, peut-être.
Elle attendra d'être seule pour libérer ses questions et leur donner une réponse.

Elle pense que ça y est.
C'est donc maintenant. Elle n'a plus de maison. Et n'a plus sa maison. Celle de maman.
Ça aussi, d'ailleurs: comment est-ce possible?

dimanche 3 janvier 2010

Voilà pourquoi les enfants n'aiment pas dormir

Cette douce mélodie montait à leurs oreilles lorsqu'ils apprenaient la nouvelle.
Ils étaient tous étendu dans l'herbe d'été. Verte et grasse.
Étendus là. Et ils écoutaient.
Les flots de paroles jetés par Alexandra tombaient de sa bouche. Les mots semblaient se trainer sur le gazon. Ils se trainaient difficilement, sans doute à cause de la signification qu'ils avaient et qui les rendaient lourds et graisseux.
C'est quand il arrivait à la première oreille de celui qui était le plus près que le premier mot arrêtait son voyage.

Ils étaient cinq étendu là. Ils étaient cinq à donner leur vie aux lèvres d'alexandra pour qu'elle continue à leur raconter lentement, trop lentement semble-t-il, le récit de ce qui était arrivé aux deux frères.
Une lenteur qui devenait au fur et à mesure surréaliste.
Et chacun d'eux écoutait, saisissant chacun leur tour les mots qui arrivaient à leur oreilles après leur long voyage. Brulés par le soleil. Les mots avait cette chaleur qu'on ne peut entendre qu'en été.

Aucun mot n'est aussi lourd en hiver.
Et aucun mot n'est aussi brûlé qu'en été, quand ils voyagent avec lenteur.
La mélodie qui passait à la radio devenait de plus en plus forte. Gênante. On l'entendit tellement qu'on se mis à ne plus comprendre ce qu'Alexandra disait. On se mit à la faire répéter. Cette musique... On se mit à se concentrer sur ses lèvres et on se mit à froncer les sourcils.
Puis on éteignit la radio.

Le soleil fit tout d'un coup mal aux yeux. Le ciel était d'un bleu profond et les garçons mettaient leur main en pare-soleil car alexandra était restée debout.
La musique qu'ils oublièrent aussi tôt qu'ils avaient éteins l'émetteur s'incrustait insidieusement au fond de leur mémoire comme un rappel. Un rappel qu'ils ne comprenaient toujours pas des années après. A chaque fois que passait la chanson If 6 Was 9 et qu'ils s'arrêteraient dans leur tâche pour écouter juste une seconde.

Et Alexandra était là, victorieuse, puisqu'elle était la première à leur dire ce qui était arrivé, et qu'à cet age-là c'est important de faire quelque chose en premier. Quoique ce soit. N'importe quoi, même le pire.

Le pire... c'était, en cet instant précis, les cinq jeunes garçons qui le créaient de toute pièce dans leur cerveau, au travers l'histoire qu'ils entendaient comme venant d'une autre planète. Incroyable. Ils est impossible que sur terre arrive quelque chose comme ce qui était arrivé il y a deux nuits, alors qu'eux-même étaient entrain de dormir.
De dormir. Ils s'en voulaient de ne s'être trouvé là-bas, à quelques quatre pâtés de maison pendant que deux jeunes frères s'entre tuaient portés par leur folie. Ils s'en voulaient de ne pas avoir été là pour voir une succession d'abomination que personne ne peut concevoir, encore aujourd'hui. Ils s'en voulaient parce que, ils le surent à l'instant même où ils entendaient Alexandra raconter ce que tout le monde disait, il s'était passer dans cette maison, cette nuit là, des horreurs qui n'existe pas sur terre. Sauf cette nuit là. À quatre patés de maison. Et ils dormaient.
Au lieu de regarder.

Cette idée était tout simplement insupportable. Celui qui est resté seul chez lui tout une soirée, qui s'est ennuyé à mourir, et qui a appris le lendemain que son idole de toujours cherchait, en bas de chez lui, un endroit où dormir, celui qui a vécu cela sait ce que ces cinq garçons avaient dans la tête, alors qu'ils entendaient cette Alexandra leur raconter ce qu'ils auraient dû savoir avant tout le monde. Car ç'aurait dû être eux qui devraient aller de maison en maison pour raconter leur roman.

Le plus grand, dorénavant, détestera par dessus tout perdre du temps.
Par principe, ils ne cessera de raconter autour de lui, ainsi qu'à ses quatre enfants, puis à ses treize petits-enfants, que l'expérience lui a appris qu'en perdant son temps on risque de rater une occasion de faire quelque chose de bien. De faire, rajout-il souvent, quelque chose qui aurait pu changer sa vie les enfants. Et il ne vous resterait que les regrets de n'avoir pas été là. Allez vous amuser maintenant; j'ai déjà assez pris votre temps.
Et les petit-enfants de terminer en disant « à tout-à-l'heure Papi ». Ils l'appellent papi, et lui regrette encore de ne pas avoir vu.